[0001] La présente invention concerne un procédé de fabrication d'un article en cuir comportant
une peausserie de dessus teintée.
[0002] Bien que, dans la suite de la description, on se réfèrera principalement à la fabrication
d'une chaussure, l'invention s'applique à la réalisation d'autres articles en cuir
(sacs, vêtements, ....), dès lors que ces articles comportent une peausserie de dessus
tannée et colorée en profondeur (par opposition à une peausserie peinte).
[0003] Dans le cas d'une chaussure, l'empeigne de la chaussure comporte, outre la doublure
et différents renforts, une peausserie à dessus (chevreau, chèvre ou veau par exemple)
découpée dans l'atelier de coupe du fabricant de chaussures à partir de peaux fournies
par le tanneur.
[0004] La peau achetée en tannerie à cet effet est systématiquement d'une couleur et d'une
qualité données, cette couleur restant celle de la chaussure finie. Ainsi, par exemple,
si on veut réaliser une chaussure d'un rouge cerise ou d'un vert céladon, il faudra
acheter chez le tanneur une peausserie rouge cerise ou vert céladon.
[0005] La contrainte créée par cet état de fait, surtout dans une industrie de la mode qui
doit suivre la réalité fluctuante de la demande, est le temps. En effet, si le tanneur
ou le fabricant de la chaussure ne disposent pas d'une avance de stock dans la couleur
désirée, il sera nécessaire de commander spécialement la couleur voulue, ce qui impose
un délai de fourniture de quelques semaines. En outre, une fois la peausserie disponible
dans la couleur voulue, il y a lieu d'ajouter au délai précédent le délai de fabrication
de la chaussure qui peut être également de quelques semaines.
[0006] Cette manière de procéder présente un certain nombre d'inconvénients, notamment l'obligation
de commander prématurément et de stocker une quantité suffisante de peaux de chaque
couleur, entraînant les immobilisations financières de trésorerie correspondantes.
En outre, il n'est possible de mettre en fabrication que des petites séries, puisque
chaque série doit être fabriquée dans sa couleur définitive.
[0007] L'un des buts de l'invention est de proposer un procédé de fabrication d'un article
en cuir qui permette de fabriquer l'article dans une peausserie n'ayant reçu ni sa
couleur, ni sa finition définitives, de façon à ne produire.d'avance que des articles
semi- finis et de les finir au dernier moment dans la couleur demandée par le marché.
[0008] Plus précisément, l'invention propose, dans le processus de fabrication de l'article
:
. un nouveau procédé de tannage d'une peausserie se prêtant à une finition définitive
ultérieure voulue, et
. un nouveau procédé original de finition de l'article.
[0009] La couleur et la finition étant apportées en fin de processus (finition de l'article)
au lieu de l'être en début de processus (tannage de la peausserie), il en résulte
un très grand nombre d'avantages, notamment la réduction des stocks de peausserie
(un stock global au lieu d'une pluralité de stocks en nombre égal au nombre de couleurs
désirées), la possibilité de mettre en fabrication des séries importantes, donc un
gain de productivité potentiel important, et la possibilité de s'adapter à la demande
du marché dans des délais de quelques jours au lieu de plusieurs semaines.
[0010] Plus précisément, le procédé de l'invention est caractérisé en ce qu'il comporte,
après tannage de la peausserie, les étapes suivantes :
a) pré-traitement de la peausserie, par retannage en milieu humide en présence d'un
agent permettant d'accroître le pouvoir absorbant de la peausserie, ainsi que d'une
teinte de base ;
b) fabrication de l'article à partir de la peausserie ainsi préparée ;
c) teinture de la peausserie de l'article à l'aide d'un colorant ;
d) application sur la peausserie d'un agent d'égalisation de la couleur et de protection
de la peausserie ;
e) application sur la peausserie d'un agent de fixation de la teinture ;
f) finition de l'article par cirage, repassage, flambage et lustrage de la peausserie.
[0011] De préférence :
- l'agent utilisé dans l'étape (a) comprend une résine polymère de retannage,
- l'agent utilisé dans l'étape (a) comprend un condensat de formaldéhyde et d'acides
phénolsulfoniques,
- la teinte de base prévue à l'étape (a) est choisie de manière à neutraliser la dominante
colorée que la peausserie présente après tannage, de sorte que cette dernière, après
l'étape (a), présente une teinte finale neutre,
- la teinture utilisée dans l'étape (c) comprend un solvant à effet mouillant, de
manière à entraîner le colorant en profondeur dans la peausserie,
- l'agent utilisé dans l'étape (d) est une solution comprenant de la caséine, une
résine acrylique, et un colorant.
- l'agent utilisé dans l'étape (e) est un mélange d'une fixation de type cellulosique
et d'huile de camphre.
[0012] D'autres caractéristiques et avantages de l'invention apparaîtront à la lecture de
la description détaillée ci-dessous d'un exemple de mise en oeuvre du procédé, appliqué
à la fabrication d'une chaussure.
EXEMPLE
[0013] On va décrire le processus complet de fabrication de la chaussure, depuis le tannage
de la peausserie jusqu'à la finition de la chaussure prête à la mise en boîte.
Tannage
[0014] Dans les procédés de tannage de l'art antérieur, après différentes opérations de
préparation (élimination de la peau des parties et des matières inutiles, préparation
à la réception des matières tannantes et augmentation de l'affinité pour celles-ci),
la peau est plongée dans un foulon où elle est brassée en milieu humide avec différents
produits chimiques dont la teinture, cette opération pouvant durer plusieurs heures.
[0015] Dans le procédé de l'invention, la préparation et le tannage sont faits de façon
conventionnelle, à la seule exception de la composition du milieu humide du foulon,
de laquelle on a supprimé la teinture.
Pré-traitement de la peausserie
[0016] De façon caractéristique de l'invention, on procède après tannage à une opération
spécifique de pré-traitement de la peausserie, de manière à donner à celle-ci le maximum
de pouvoir absorbant pour faciliter la pénétration du colorant et des produits de
finition dans une étape ultérieure. A cet effet, on procède à un retannage, c'est-à-dire
une opération qui consiste à faire absorber par un cuir déjà tanné des matières non
tannantes, le travail étant exécuté dans un foulon semblable à celui qui sert pour
le tannage, mais avec un volume réduit de jus retannant.
[0017] L'agent utilisé comporte :
. un agent de retannage, qui peut être une résinepoly- mère de retannage (par exemple
la référence NOUALTAN 1106 L fournie par SCHIMMER & SCHWARTZ France) ou un condensat
de formaldéhyde et d'acide phénolsulfonique (par exemple la référence IRGATAN LC fournie
par CIBA-GEIGY), ainsi que
. un agent de nourriture du cuir, par exemple un produit de réaction d'hydrocarbures
aliphatiques partiellement sulfochloré combiné avec des huiles naturelles sul- fitées
et des adoucissants spéciaux, tel que la référence PELGRASSOL MB fournie par SCHIMMER
& SCHWARTZ France.
[0018] Grâce à cette étape de pré-traitement, la peausserie sera prête à recevoir ultérieurement
les produits de finition qu'elle n'aura pas reçus en tannerie.
[0019] Par ailleurs, pour compenser la dominante colorée spécifique apportée par l'opération
de tannage, notamment la dominante bleue spécifique du tannage au chrome, on apporte
à la peau une teinte de base, en ajoutant au jus retannant du foulon un colorant approprié.
[0020] Dans le cas du tannage au chrome, on emploie un colorant orange à très faible dose
(orange néolane de CIBA-GEIGY par exemple), de sorte que, après retannage, la peausserie
présente une teinte finale neutre (on notera que la teinte de base est toujours la
même, et ne dépend pas de la couleur finale que l'on voudra donner à la chaussure).
[0021] La peausserie, qui n'a reçu aucun produit de finition, est livrée par le tanneur
au fabricant de chaussures dans cet état semi-fini.
Fabrication de la chaussure
[0022] Les pièces formant l'empeigne de la chaussure (c'est-à-dire le dessus, la doublure
et les renforts) sont découpées à partir de peaux fournies par les tanneurs (en ce
qui concerne le dessus de la chaussure, la peausserie aura été préparée par le procédé
spécifique décrit plus haut). Ces pièces sont ensuite assemblées ensemble sur une
forme en bois ou en matière plastique, puis la semelle et le talon sont posés.
[0023] Toutes ces opérations sont réalisées de la même façon que dans la technique antérieure.
Il y a simplement lieu, du fait du pouvoir absorbant de la peau, d'apporter une attention
toute particulière en fabrication pour éviter les taches grasses, les taches de colle,
.....
Teinture
[0024] On procède ensuite à la mise en couleur de la chaussure à sa teinte définitive. De
préférence, la teinture est faite avec des solvants mouillants, gras et lourds, qui
ne sèchent pas les peaux et qui facilitent la pénétration de la couleur. On utilise
par exemple comme solvant la référence 300 N fournie par CFPI, les colorants étant
par exemple des colorants BAYDERME-A LIQUIDE fournis par BAYER. Un tel solvant aura
pour avantage d'entraîner avec lui les colorants à l'intérieur de la peausserie, permettant
une teinture en profondeur. De la sorte, et grâce au pouvoir absorbant procuré par
le pré-traitement au niveau de la tannerie, les produits de finition (teinture, résines,
alcool) pourront pénétrer en profondeur dans la chaussure et donner à celle-ci l'aspect
final d'une chaussure fabriquée selon les procédés conventionnels, à partir d'une
peausserie normalement tannée et colorée, et non pas celui d'une chaussure qu'on aurait
peinte ou repeinte (techniques réservées aux fabrications de bas de gamme).
Finition
[0025] Après teinture, on procède à un second apport de produit teintant de manière à égaliser
la couleur et isoler la peau des agressions extérieures. Une solution appropriée est
par exemple une solution de caséine et de résine acrylique (par exemple la résine
THERMACRYL 122 fournie par CFPI) mélangée à un colorant, qui n'est pas nécessairement
le même que celui - utilisé pour l'opération de teinture.
[0026] On applique ensuite sur la peausserie un agent de fixation de type cellulosique (par
exemple la laque GK 35 fournie par CFPI) mélangé avec de l'huile de camphre. Cette
fixation devra pouvoir résister au frottement du fer chaud et permettre sa glisse.
[0027] On notera que tous les produits de finition utilisés sont identiques à ceux utilisés
en tannerie dans les procédés classiques, seules les proportions des mélanges devant
être adaptées.
[0028] Enfin, on apporte à la chaussure son finissage définitif par cirage à la couleur,
repassage, flambage et lustrage.
1. Un procédé de fabrication d'un article en cuir, notamment d'une chaussure, comportant
une peausserie de dessus teintée, caractérisé en ce qu'il comporte, après tannage
de la peausserie, les étapes suivantes :
a) pré-traitement de la peausserie, par retannage en milieu humide en présence d'un
agent permettant d'accroître le pouvoir absorbant de la peausserie, ainsi que d'une
teinte de base;
b) fabrication de l'article à partir de la peausserie ainsi préparée ;
c) teinture de la peausserie de l'article à l'aide d'un colorant ;
d) application sur la peausserie d'un agent d'égalisation de la couleur et de protection
de la peausserie ;
e) application sur la peausserie d'un agent de fixation de la teinture ;
f) finition de l'article par cirage, repassage, flambage et lustrage de la peausserie.
2. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel l'agent utilisé dans l'étape (a)
comprend une résine polymère de retannage.
3. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel l'agent utilisé dans l'étape (a)
comprend un condensat de formaldéhyde et d'acides phénolsulfoniques.
4. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel la teinte de base prévue à l'étape
(a) est choisie de manière à neutraliser la dominante colorée que la peausserie présente
après tannage, de sorte que cette dernière, après l'étape (a), présente une teinte
finale neutre.
5. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel la teinture utilisée dans l'étape
(c) comprend un solvant à effet mouillant, de manière à entraîner le colorant en profondeur
dans la peausserie.
6. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel l'agent utilisé dans l'étape (d)
est une solution comprenant de la caséine, une résine acrylique, et un colorant.
7. Un procédé selon la revendication 1, dans lequel l'agent utilisé dans l'étape (e)
est un mélange d'une fixation de type cellulosique et d'huile de camphre.