[0001] La présente invention a pour objet un revêtement multicouche pour les ouvrages d'art
métalliques.
[0002] Le revêtement d'un ouvrage comportant un tablier métallique - outre qu'il doit posséder
les propriétés et caractéristiques d'une couche de roulement d'une chaussée classique
d'autoroute - doit également répondre à certains problèmes spécifiques engendrés par
la technique des dalles orthotropes, certaines de ces propriétés étant d'ailleurs
contradictoires.
[0003] Il doit en particulier :
- présenter une surface convenable au roulement des véhicules du point de vue sécurité
et confort (propriétés antidérapantes et uni convenables),
- résister à diverses sollicitations, les unes verticales, les autres horizontales,
provoquées par le trafic : résistance au poinçonnement, au cisaillement, au fluage,
à la fatigue,
- être peu susceptible aux conditions atmosphériques et éventuellement posséder une
bonne résistance aux produits de déverglaçage.
[0004] Outre ces propriétés routières habituelles, le revêtement sur tablier métallique
à dalle orthotrope doit posséder certaines qualités particulières :
- adhérence parfaite et durable du revêtement sur la dalle (même par températures extrêmes),
- grande souplesse pour suivre les déformations du support sans donner lieu à des fissurations
ou à des décollements.
[0005] Ces déformations sont de deux ordres :
- flexion générale de l'ouvrage : les ouvrages métalliques à dalles orthotropes sont
généralement à longue portée et possèdent une très grande flexibilité,
- flexion locale : au passage d'une charge, la rigidité est plus grande au droit des
raidisseurs qui se comportent comme des points durs fixes.
[0006] Le revêtement se trouve donc soumis à des contraintes de compression et de traction,
tout en étant sollicité par d'importantes contraintes de cisaillement.
[0007] Différentes solutions ont été envisagées pour résoudre ces problèmes :
- solutions épaisses (supérieures à 5 cm).
- solutions minces (1 à 3 cm).
- solutions ultra-minces (de l'ordre du cm).
[0008] Quelles que soient les solutions choisies qui ont toutes leurs inconvénients et leurs
avantages, il est apparu, dès les premières études, que les sollicitations sont telles
que tous les revêtements à base de liant classique seront détruits dans un délai très
bref.
[0009] On a alors proposé diverses solutions à base d'asphalte coulé, de brai ou de bitume
époxy, de bitumes améliorés soit par des caoutchoucs naturels, soit pas des caoutchoucs
synthétiques.
[0010] Dans la plupart des cas, malgré des résultats prometteurs au niveau du laboratoire,
les revêtements réalisés ont eu une durée de vie faible, soit, ce qui était le cas
le plus général, par manque d'adhérence sur le support, soit encore par manque d'élasticité
ou par tendance au fluage.
[0011] On a alors cherché à améliorer les propriétés rhéologiques d'un liant bitumineux
de façon à obtenir un liant capable de permettre la confection d'un enrobé :
- d'une part, suffisamment souple pour pouvoir suivre les déformations de la suface
métallique du pont sans se fissurer (élasticité du liant),
- d'autre part, suffisamment résistant pour pouvoir être appliqué sur un support rigide
(plaque d'acier) sans risque d'orniérage (cohésion du liant).
[0012] Une amélioration a été obtenue en associant au bitume deux polymères compatibles
entre eux et dont la combinaison avec le bitume permettait en même temps d'améliorer
les deux propriétés recherchées : élasticité et cohésion (BF 72.17111).
[0013] La présente invention a pour objet de fournir un revêtement amélioré, ainsi qu'un
procédé pour appliquer ledit revêtement sur un ouvrage routier métallique.
[0014] Le revêtement pour les ouvrages d'art métalliques selon l'invention est un revêtement
multicouche caractérisé en ce qu'il comporte :
- une membrane bitumineuse constituée essentiellement par un bitume modifié par addition
de copolymères thermoplastiques,
- une couche d'enrobé coulé à froid constitué par un granulat et un liant bitumineux.
[0015] La couche d'enrobé coulé à froid est constituée par un liant bitumineux et un granulat
dont la dimension maximale des particules reste inférieure à environ 10 mm.
[0016] Le granulat est de préférence intégralement concassé.On préfère plus particulièrement
un sable 0/6, 0/4 ou 0/2. L'épaisseur de la couche d'enrobé coulé à froid est comprise
de préférence entre 3 et 12 mm. Elle est essentiellement fonction de la granulométrie
du sable. Ainsi, pour un sable 0/2, l'épaisseur est de l'ordre de 3 à 5 mm ; pour
un sable 0/4, elle est de 5 à 7 mm; pour un sable 0/6, elle est de 7 à 10 mm.
[0017] Le liant bitumineux contient essentiellement un bitume. Le bitume est choisi parmi
les bitumes, de préférence parmi les bitumes de grades 60/70, 80/100, et 180/220 modifiés
par addition de copolymères thermoplastiques, soit par mélange direct à chaud de bitume
pur et de copolymère, soit par mélange indirect à froid d'émulsion de bitume pur et
de dispersion aqueuse de copolymère au moment de la fabrication de l'enrobé à couler.
De préférence, on utilisera des copolymères éthylène vinyle acétate (EVA) ou styrène
butadiène styrène triséquencé (SBS) ou éthylène méthacrylate (EMA). Mais on pourra
également utiliser les copolymères styrène butadiène rubber biséquencé (SBR) et les
copolymères acryliques ainsi que divers mélanges de ces copolymères.
[0018] La teneur en copolymère est au plus égale à environ 5 % en poids. L'addition de tels
copolymères a pour effet un moindre rejet à la mise en service, une meilleure liaison
liant-granulat, une résistance à la saumure accrue, une réduction de la sensibilité
à la chaleur et au froid, une plus grande cohésion ainsi qu'une meilleure aptitude
à la déformation.
[0019] Une charge minérale peut éventuellement compléter la granulométrie des granulats
comme par exemple une poudre de roche broyée, de préférence calcaire, du ciment, des
fibres de roche naturelle ou articielle. La teneur en charge minérale est inférieure
à 10 %.
[0020] Dans une variante de l'Invention, le liant bitumineux contient en outre des fibres
synthétiques. Les fibres utilisées sont des fibres organiques de synthèse ultrafines
(quelques décitex) et relativement longues (4 à 8 mm). Elles sont choisies en fonction
du module élastique du matériau dont elles sont constituées, afin d'obtenir un enrobé
fibreux dont la déformabilité est compatible avec celle du support sur lequel il sera
appliqué. Les fibres à faible module seront utilisées pour les supports les plus déformables.La
proportion de fibres est avantageusement comprise entre 0,05 et 3 % en poids. Cette
proportion peut être très faible, mais compte-tenu de l'extrême finesse de ces fibres,
leur nombre au mètre carré d'enrobé coulé est considérable, de même que la longueur
du réseau qu'elles constituent.
[0021] La couche d'enrobé coulé à froid peut être une monocouche ou une bicouche.
Lorsqu'elle est appliquée avec une épaisseur suffisante, elle peut servir non seulement
d'écran thermique pour la membrane bitumineuse, mais également de couche de roulement.
Dans ce cas, il est souhaitable d'utiliser pour la couche de roulement en enrobé coulé
à froid, un granulat présentant une granulométrie discontinue. Le granulat peut être
du type discontinu 0/6 ou 0/10. La texture superficielle de la couche d'enrobé coulé
à froid ainsi obtenue est très grenue, ce qui présente de nombreux avantages : diminution
de l'éblouissement, meilleure évacuation de l'eau, amélioration du niveau d'adhérence,
même à grande vitesse.
[0022] L'enrobé coulé à froid est préparé en enrobant à froid par une émulsion de bitume,
un mortier constitué par le granulat précité et par un régulateur de rupture de l'émulsion.
Le régulateur peut être un ciment.
[0023] Lorsque l'enrobé coulé à froid contient des fibres, ces fibres sont intégrées au
mortier.
[0024] L'émulsion du liant est généralement une émulsion cationique, monophase, à rupture
lente et contrôlée.
[0025] L'eau de prémouillage du mortier peut contenir un agent tensio-actif comme régulateur
de rupture d'émulsion.
[0026] Une composition type est par exemple la suivante, exprimée en parties en poids
![](https://data.epo.org/publication-server/image?imagePath=1992/12/DOC/EPNWA1/EP91402378NWA1/imgb0001)
[0027] Le revêtement selon l'invention peut comporter une couche d'enrobés à chaud au bitume
modifié comme couche de roulement, cette couche étant appliquée sur la couche d'enrobé
coulé à froid.
[0028] La membrane bitumineuse a, de préférence, une épaisseur comprise entre environ 2
et environ 4 mm, correspondant à environ 2 à 4 kg/m². Elle est constituée essentiellement
par un liant bitumineux analogue à celui entrant dans la composition de l'enrobé coulé
à froid. Elle contient par conséquent un bitume, de préférence de pénétrabilité 60/70,
80/100 et 180/220, modifié par addition de copolymères thermoplastiques. De préférence,
on utilisera des copolymères éthylène vinyle acétate (EVA) ou styrène butadiène styrène
triséquencé (SBS) ou éthylène méthacrylate (EMA). Mais on pourra également utiliser
les copolymères styrène butadiène rubber biséquencé (SBR) et les copolymères acryliques
ainsi que divers mélanges de ces copolymères.
La teneur maximale en copolymère est imposée par la viscosité limita du bitume modifié
jusqu'à laquelle il s'écoule par une rampe d'épandage chauffante et calorifugée tout
en restant à une température inférieure à la température de dégradation du copolymère.
Le liant bitumineux destiné à former la membrane bitumineuse contient avantageusement
une résine, de préférence une résine terpène-phénolique. Une telle résine améliore
le pouvoir collant de la membrane bitumineuse. La quantité de résine est de l'ordre
de 5% en poids. On peut citer la résine DERTOPHENE TL fabriquée par "Les dérivés résiniques
et terpéniques SA". En outre, pour diminuer la viscosité du liant, il est souhaitable
d'y incorporer un dope. Une quantité appropriée de dope est de l'ordre de 3% en poids.
Le revêtement selon l'invention doit être appliqué sur une surface propre, exempte
de rouille et hors d'eau. La surface est préparée par grenaillage. Ensuite, un vernis
de protection est appliqué sur le métal décapé, dans le but de le soustraire aux conditions
climatiques. Ce vernis peut posséder des propriétés inhibitrices de corrosion permettant
de protéger plus efficacement la tôle. Le vernis de protection peut être un vernis
à base de bitume modifié par addition d'élastomères et comportant des agents adhésifs.
[0029] Le procédé d'élaboration du revêtement selon l'invention consiste à appliquer, sur
un support métallique préalablement décapé et recouvert d'un vernis de protection,
1) la membrane bitumineuse par répandage à chaud d'un liant bitumineux
2) la couche d'enrobé coulé à froid.
[0030] Le cas échéant, si la couche d'enrobé coulé à froid est destinée uniquement à servir
d'écran thermique pour la membrane bitumineuse, on applique une couche de roulement
adaptée par des procédés connus.
[0031] La présente invention est décrite plus en détails par les exemples suivants, donnés
à titre illustratif, non limitatif.
EXEMPLE 1
a) Préparation du support
[0032] Sur un support métallique décapé par grenaillage, on a appliqué par pulvérisation
environ 100 g/m² d'Impression Parafor, vernis de protection commercialisé par Siplast.
b) Application de la membrane bitumineuse
[0033] On a appliqué par répandage à raison de 3 kg/m², un mélange, dit "Mobilplast A",
portée à une température de l'ordre de 180°C, ayant la composition suivante, exprimée
en parties en poids
- bitume 80/100
- 77
- Copolymère EVA 33/45
- 18
- Résine DERTOPHENE TL
- 5
- Dope
- 0,3
[0034] La membrane obtenue a une épaisseur d'environ 3 mm.
c) Application d'une couche d'enrobé coulé à froid (écran thermique).
[0035] On a utilisé comme liant bitumineux, le Mobilplast G3 ® commercialisé par le demandeur,
contenant 958 en poids de bitume 80/100 émulsionable, et 3% en poids d'un copolymère
EVA 33/45.
[0036] On a préparé une émulsion, dite émulsion à 60%, ayant la composition suivante, exprimée
en kg :
- liant Mobilplast G3®
- 600
- agent émulsifiant
- 9
- HCl (d-1,19)
- 2,15
- Eau
- 400
[0037] Les caractéristiques de cette émulsion sont les suivantes:
- - pH
- 2 à 3,5
- - viscosité Engler
- 2 à 6 degrés
- - refus sur tamis de
-
- - 0,630 mm
- < 0,1%
- - 0,160 mm
- < 0,25%
- - indice de rupture LCPC
- > 160
- - diamètre médian
- 2 à 4 µm
- - sédimentation à 7 jours
- < 5%
[0038] La composition destinée à former la couche d'enrobé coulé à froid a été préparée
en malaxant pendant 2 mn le mélange suivant, dans lequel les proportions sont exprimées
en parties en poids :
![](https://data.epo.org/publication-server/image?imagePath=1992/12/DOC/EPNWA1/EP91402378NWA1/imgb0002)
[0039] L'épaisseur de la couche d'enrobé coulé à froid est de l'ordre de 8 mm.
d) Application d'une couche d'enrobé coulé à froid constituant la bande de roulement
(Betonplast 0/10)
[0040] On a utilisé le mélange MOBILPLAST A de l'étape b) et on a préparé la composition
suivante, de la même manière qu'en c):
![](https://data.epo.org/publication-server/image?imagePath=1992/12/DOC/EPNWA1/EP91402378NWA1/imgb0003)
[0041] L'épaisseur de la couche est de l'ordre de 5 cm.
EXEMPLE 2
[0042] Le complexe tel que décrit dans l'exemple 1 a été soumis à un essai de fatigue. Les
essais ont été effectués à l'aide d'éprouvettes préparées à la table de compactage
de la manière suivante: une tôle d'acier de 270 mm sur 590 mm ayant une épaisseur
de 12 mm et munie d'un pied central débordant, a été revêtue par un multicouche tel
que décrit dans l'exemple 1:
- vernis Parafor : 100 g/m²
- membrane bitumineuse : 3 Kg/m² soit environ 3mm
- couche d'enrobé coulé à froid (écran thermique) 8 mm
- couche de Bétonplast constituant la bande de roulement : épaisseur après compactage:
5 cm;
compacité : 94 %
[0043] Trois éprouvettes similaires ont été testées. Les résultats des essais figurent dans
le tableau I ci-dessous.
[0044] L'éprouvette, fixée sur un bâti rigide, est soumise à des flexions négatives alternées,
à une fréquence de 4 hertz et à différentes températures.
[0045] La force imposée, au centre de l'âme centrale, correspond à une contrainte de 8,33
daN/mm² sur la tôle d'acier. Cette contrainte est celle qui serait provoquée par un
essieu de 11 tonnes pour une tôle de 12 mm d'épaisseur.
[0046] Les fissurations sont suivies au moyen de jauges de déformation positionnées par
collage sur la surface de l'enrobé et les décollements par des jauges sur la tranche
verticale, au droit des cordons de soudures
![](https://data.epo.org/publication-server/image?imagePath=1992/12/DOC/EPNWA1/EP91402378NWA1/imgb0004)
[0047] Habituellement, on considère qu'un revêtement non dégradé après 1 000 000 de cycles
est un bon revêtement.
[0048] Il apparait ainsi que les revêtements multicouches, selon l'invention sont particulièrement
bien adaptés pour les ouvrages d'art routiers à tablier métallique.
1. Revêtement multicouche pour ouvrage d'art routier à tablier métallique, caractérisé
en ce qu'il est constitué par :
- une membrane bitumineuse constituée essentiellement par un bitume modifié par addition
de copolymères thermoplastiques,
- une couche d'enrobé coulé à froid constitué par un granulat et un liant bitumineux.
2. Revêtement selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'enrobé coulé à froid
est constitué par un liant bitumineux et un granulat dont la dimension maximale des
particules reste inférieure à environ 10 mm.
3. Revêtement selon la revendication 2, caractérisé en ce que le granulat est intégralement
concassé.
4. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que
le granulat peut comporter une quantité inférieure à 10% en poids d'une charge minérale.
5. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que
le liant bitumineux de la couche d'enrobé coulé à froid et/ou de la membrane bitumineuse
contient essentiellement un bitume de pénétrabilité 60/70, 80/100, ou 180/220.
6. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que
le liant bitumineux de la couche d'enrobé coulé à froid et/ou de la membrane bitumineuse
est modifié par addition de copolymères thermoplastiques.
7. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que
les copolymères thermoplastiques sont choisis parmi les copolymères éthylène vinyle
acétate (EVA) ou styrène butadiène styrène triséquencé (SBS) ou éthylène méthacrylate
(EMA), les copolyméres styrène butadiène rubber biséquencé (SBR) et les copolymères
acryliques ainsi que divers mélanges de ces copolymères.
8. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que
le liant bitumineux de la couche d'enrobé coulé à froid contient des fibres organiques
de synthèse.
9. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce que
la couche d'enrobé coulé à froid est une monocouche servant d'écran thermique et en
ce qu'elle est revêtue d'une couche de roulement.
10. Revêtement selon la revendication 9, caractérisé en ce que la couche de roulement
est une couche d'enrobés à chaud au bitume modifié.
11. Revêtement selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce que
la couche d'enrobé coulé à froid est une bicouche servant de couche de roulement,
la partie supérieure contenant un granulat discontinu.
12. Procédé d'élaboration d'un revêtement selon l'une quelconque des revendications 1
à 11, caractérisé en ce qu'il consiste à appliquer, sur un support métallique préalablement
décapé et recouvert d'un vernis de protection,
1) la membrane bitumineuse par répandage à chaud d'un liant bitumineux
2) la couche d'enrobé coulé à froid.
13. Procédé selon la revendication 12, caractérisé en ce qu'une seconde couche d'enrobé
coulé à froid servant de couche de roulement est appliquée.
14. Procédé selon la revendication 12, caractérisé en ce qu'une couche d'enrobés à chaud
est appliquée sur la couche d'enrobé coulé à froid.