[0001] La présente invention a pour objet un procédé permettant de réaliser un colaminage
d' un acier moyennement ou fortement allié sur un acier doux, ce qui n'a jusqu'à présent
jamais été possible de réaliser industriellement.
[0002] Le colaminage est un procédé bien connu qui permet de plaquer par forgeage à une
température d'environ 1150° C une mise en acier noble, donc cher, sur un support en
acier peu allié, donc bon marché. Par ce procédé on obtient des barres bimétalliques,
appelées également barres à mise rapportée ou barres en acier composite ou encore
barres en acier étoffé.
[0003] Cette technique de colaminage est actuellement utilisée principalement pour la fabrication
de plats d'usure, par exemple des glissières de laminoirs, ou pour la fabrication
de lames et de couteaux industriels à mise rapportée, par exemple les lames de massicot
pour le papier, de dérouleuse ou de trancheuse pour le bois.
[0004] Toutefois, si le colaminage donne d'excellents résultats avec des mises en acier
faiblement allié, il ne donne pas satisfaction pour des mises en acier moyennement
ou fortement alliées.
[0005] Au sens de la présente description, on entendra par acier faiblement allié des nuances
d'acier comportant un pourcentage maximum de 2% d'éléments d'alliage tels le silicium
(Si), le molybdène (Mo), le tungstène (W), le vanadium (V) et/ou le chrome (Cr) comme
par exemple les nuances 80WC20, 110WC10, 90MCW5, ou 60WC20. On entendra par aciers
moyennement ou fortement alliés des nuances d'acier comportant plus de 2% d'éléments
d'alliage comme par exemple le Z160CDV12 ou des aciers dits rapides du type 18-0-1
ou 6-5-2, qui sont un cas particulier des aciers fortement alliés.
[0006] La raison pour laquelle le colaminage d'un acier moyennement ou fortement allié avec
un acier doux n'a pas été jusqu' à présent industriellement mis en oeuvre est que
les éléments d'alliage (Si, Mo, W, V, Cr) provoquent une apparition trop importante
d'oxydes qui rendent le collage de la mise sur son support très aléatoire, d'où un
taux de rebut trop important.
[0007] C'est pourquoi, actuellement les lames industrielles comportant une mise en acier
rapide que l'on trouve sur le marché sont fabriquées par brasage au cuivre, le cuivre
interposé entre le support en acier doux et la mise en acier rapide assurant un collage
efficace après fusion et refroidissement.
[0008] La présente invention a pour but de permettre la fabrication industrielle par colaminage
de barres d'acier étoffé comportant des mises en acier moyennement ou fortement allié.
[0009] Dans ce but, selon l'invention les mises sont constituées par des aciers alliés obtenus
par la métallurgie des poudres dans leur état brut de compactage.
[0010] L'invention consiste en effet dans l'utilisation de la gangue en acier doux recouvrant
intégralement les lingots d'acier fritté après compactage comme couche de collage
avec l'acier doux du support et de la contre-mise.
[0011] L'élaboration des aciers et alliages par la métallurgie des poudres est connue :
elle consiste à pulvériser le métal liquide en minuscules gouttelettes qui sont refroidies
sous forme de poudre constituée par des billes sphériques microscopiques. Les barres
d'alliage sont obtenues par compactage à très haute pression de capsules en acier
doux renfermant de la poudre d'alliage. Les lingotins obtenus sont constitués par
une âme en acier fritté auquel est intimement liée une gangue superficielle en acier
doux provenant de la capsule contenant la poudre avant compactage. Les lingotins sont
ensuite laminés en barres et ces barres sont ensuite usinées pour les débarrasser
de leur gangue d'acier doux.
[0012] Dans le procédé selon l'invention, on conserve au contraire cette gangue qui lors
du colaminage ne provoquera pas l'apparition d'oxydes dans des proportions néfastes
au collage de la mise sur son support.
[0013] Afin de faciliter la compréhension de l'invention on va décrire ci-après à titre
d'exemple non limitatif l'application du procédé à la fabrication d'une lame de massicot
en référence aux dessins annexés sur lesquels on a représenté :
- Figure 1 une vue schématique en perspective d'un assemblage d'une barre en acier doux
avec une mise en acier rapide fritté et une contre-mise en acier doux ;
- Figure 2 une vue schématique en perspective illustrant l'opération de colaminage.
- Figure 3 une vue schématique en coupe d'échelle agrandie selon la ligne III-III de
la figure 1 ;
- Figure 4 une vue schématique en perspective montrant partiellement une lame de massicot
obtenue par le procédé selon l'invention.
[0014] La figure 1 illustre la première phase de la fabrication de la lame de massicot.
On assemble la mise 1 en acier rapide fritté munie da sa gangue de compactage en acier
doux sur son support en acier doux 2, au moyen d'un cordon de soudure 3. La mise 1
est bordée par une contre-mise 6 en acier doux qui est également solidarisée sur le
support 2 par un cordon de soudure 3. Cet assemblage grossier par soudure a pour fonctions
de maintenir les pièces 1, 2, et 3 pendant l'opération de colaminage et d'éviter autant
que faire se peut l'oxydation des surfaces en contact lors du réchauffage à environ
1100-1150° C qui précède immédiatement le colaminage, les cordons de soudure 3 jouant
le rôle de cordons d'étanchéité.
[0015] Ensuite, on procède à l' opération de colaminage qui est représentée schématiquement
à la figure 2. Au cours de cette opération, le bloc réalisé à la figure 1 et préchauffé
est passé au moins une, et de préférence plusieurs, fois dans un laminoir pour obtenir
un rapport de corroyage d'environ 4 à 5.
[0016] Comme indiqué précédemment, du fait que la mise 1 est faite d'une barre d'acier fritté
ayant gardé sa gangue d'acier doux, la qualité du forgeage obtenu assurera une très
bonne liaison physico-chimique entre la mise 1, la contre-mise 6 et le support 2.
[0017] On voit en coupe sur la figure 3 l'âme 4 en acier rapide fritté de la mise 1 parfaitement
entourée de sa gangue 5 en acier doux. Le colaminage a plaqué cette mise 1 et sa contre-mise
6 sur le support 2, en créant une liaison intime entre les trois pièces.
[0018] Pour obtenir le produit fini, en l'espèce la lame de massicot représentée à la figure
4, la barre est ensuite traitée thermiquement et usinée. Par fraisage et rectification
le long des lignes X-X et Y-Y les parties 5a et 5b de la gangue sont enlevées; un
affûtage de l'âme en acier rapide fritté ainsi dégagé permet de former le tranchant
de la lame. Après trempe, les trous et/ou encoches de fixation de l'outil 1 sont fait
par perçage et/ou fraisage dans la partie en acier doux, à savoir la contre-mise et
le support, cette partie ne prenant pas la trempe.
[0019] La possibilité procurée par l'invention d'utiliser le colaminage pour de l'acier
moyennement ou fortement allié permet de maintenir un prix des produits finis compétitif
avec celui des produits actuellement obtenus par brasage, malgré le surcoût résultant
de l'emploi d'acier fritté. En contrepartie, la qualité des outils obtenus grâce à
l'emploi de l'acier fritté est notablement plus élevée que celle des outils actuellement
proposés sur le marché.
[0020] On comprend que l'invention n' est pas limitée à la fabrication de lames de massicot
telle que celle décrite ci-dessus, mais englobe toute barre d'acier/alliage étoffé
obtenue par colaminage d'une mise en alliage fritté ayant conservé sa gangue en acier
doux et à tout outil fabriqué à partir d'une telle barre.
1. Procédé de fabrication par colaminage de barres à partir d'un support en acier doux
(2) et d'une mise métallique (1) confinée dans une enveloppe superficielle également
en acier doux (5), la mise (1) étant disposée directement sur le support (2), caractérisé
en ce que la mise (1) est constituée par un acier moyennement ou fortement allié obtenu
par la métallurgie des poudres, frittée préalablement à sa mise en place sur le support
(2) et ayant conservé son enveloppe de compactage, en ce que, avant le laminage, la
mise (1) est grossièrement fixée au support (2) par soudage, et en ce que l'ensemble
est ensuite passé au laminoir pour subir simultanément une action de placage de la
mise sur son support et de corroyage de l'ensemble.
2. Procédé suivant la revendication 1, caractérisé en ce que l'acier de la mise (1) comporte
plus de 2% d'éléments d'alliage tels que le silicium (Si), le molybdène (Mo), le tungstène
(W), le vanadium (V) et/ou le chrome (Cr).
3. Procédé suivant la revendication 2, caractérisé en ce que l'acier est d'une nuance
désignée Z160CDV12.
4. Procédé suivant la revendication 2, caractérisé en ce que l'acier est un acier dit
rapide du type 18-0-1 ou 6-5-2.
5. Procédé suivant l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce
qu'une contre-mise en acier doux (6) est, avant le colaminage, juxtaposée à la mise
(1) sur le support (2) et également solidarisée à celui-ci ainsi qu'à la mise (1)
par des cordons de soudure (3).
6. Outil constitué par un support en acier doux (2) et une partie tranchante en acier
moyennement ou fortement allié (1), cet outil étant fabriqué à partir d'une barre
plane d'acier fritté (4), obtenue par le procédé suivant l'une quelconque des revendications
précédentes.