Domaine de l'invention
[0001] La présente invention concerne un module de propulsion cryotechnique à faible poussée
applicable à un lanceur classique ou à un lanceur récupérable.
[0002] L'invention concerne plus particulièrement un module de propulsion cryotechnique
à faible poussée permettant d'assurer le transfert d'orbite d'un satellite, le module
de propulsion pouvant être intégré au satellite ou pouvant constituer un étage de
propulsion séparé.
Art antérieur
[0003] Une préoccupation majeure dans le domaine du lancement de satellites réside dans
l'amélioration de la masse injectée en orbite géostationnaire pour une masse de lanceur
déterminée.
[0004] La méthode la plus classique consiste à injecter un satellite en orbite de transfert
dite GTO (Geostationary Transfer Orbit) puis à transférer ce satellite en orbite géostationnaire
à l'aide d'un moteur d'apogée biliquide, le module de propulsion biliquide étant intégré
au satellite.
[0005] On a par ailleurs proposé de transférer un satellite d'une orbite basse à une orbite
géostationnaire à l'aide d'un étage héliothermique utilisant l'hydrogène liquide.
[0006] Un tel procédé est décrit par exemple dans l'article de J.A. Bonometti et C. W. Hawk
intitulé "Solar thermal rocket research apparatus and proposed testing" (University
of Alabama - 1994).
[0007] Ce procédé est également évoqué dans l'article de J. M. Shoji paru dans Progress
in Astronautics and Aeronautics-AIAA- Volume 87 et intitulé "Potential of advanced
solar thermal propulsion (pages 30 à 47) Orbit raising and maneuvering propulsion:
research status and needs".
[0008] Selon ce procédé connu, qui est illustré sur la Figure 2, la lumière du soleil est
concentrée par un miroir parabolique 5 sur un four solaire 6 dans lequel l'hydrogène
est réchauffé à une température de l'ordre de 2000 K. L'hydrogène est ensuite détendu
dans une tuyère d'un propulseur 8 en fournissant une vitesse d'éjection élevée (7500
à 8000 m/s), soit une impulsion spécifique voisine de 750 à 800 s. On voit sur la
Figure 2 le schéma d'un tel agencement avec un satellite 2 relié d'une part à un lanceur
par une interface 1 et d'autre part à un réservoir d'hydrogène 3 par un treillis structural
4. La référence 7 montre de façon schématique un dispositif d'acquisition de l'hydrogène
liquide pour alimenter le four solaire 6 et le propulseur 8.
[0009] Un tel dispositif, qui n'a jamais été appliqué en pratique, devrait théoriquement
permettre d'augmenter la masse injectée en orbite géostationnaire. Cette configuration
présente cependant plusieurs inconvénients.
[0010] En particulier, afin d'atteindre une température de 2000 K, il est nécessaire de
recourir à un facteur de concentration du flux solaire de 5000 à 8000, ce qui suppose
un miroir de très bonne qualité, très difficile à obtenir lorsque l'on est soumis
à des contraintes impliquant de limiter la masse embarquée. De plus, le pointage vers
le soleil doit être très précis, de l'ordre de ± 5 minutes d'arc selon deux axes,
ce qui pose des problèmes de contrôle d'attitude.
[0011] L'encombrement du réservoir 3 d'hydrogène liquide constitue également une difficulté.
En effet, à titre d'exemple, pour obtenir une impulsion totale fournie de 30 MN.s
(MegaNewton.seconde), on doit utiliser un réservoir contenant 4000 kg d'hydrogène
liquide qui présente alors un volume de 60 m
3 (ce qui implique par exemple un diamètre de 4,2 m et une hauteur de 5 m).
[0012] Les développements des systèmes de transfert d'orbite basés sur un étage héliothermique
utilisant de l'hydrogène liquide sont donc hypothéqués par ces inconvénients.
[0013] Selon une autre technique permettant d'augmenter la masse placée en orbite géostationnaire
ou GTO, on a recours à un étage supérieur de lanceur du type cryotechnique, qui permet
d'utiliser des réservoirs de volume relativement réduit permettant une intégration
plus aisée dans le lanceur. Ainsi, pour obtenir une impulsion totale de 30 MN.s, un
étage cryotechnique à hydrogène liquide et oxygène liquide nécessite une masse d'ergol
de 6600 kg mais le volume des réservoirs n'est que de 22 m
3.
[0014] Les étages cryotechniques mis en oeuvre actuellement nécessitent cependant l'utilisation
de turbopompes, ce qui accroît le coût.
[0015] Certains auteurs ont proposé de réaliser des étages cryotechniques alimentés par
pression, sans utilisation de turbopompes, mais ces concepts n'ont pas donné lieu
à des réalisations concrètes. En effet, en pratique, la pression d'hydrogène doit
toujours être supérieure à la pression d'oxygène afin d'assurer le refroidissement
régénératif de la chambre de combustion. Il s'ensuit que la masse d'hélium nécessaire
à la mise en pression est alors prohibitive.
Objet et description succincte de l'invention
[0016] L'invention vise à remédier aux inconvénients précités et notamment à permettre d'assurer
le transfert d'orbite d'un satellite avec un dispositif plus simple, moins lourd et
moins encombrant que les dispositifs de l'art antérieur en évitant l'utilisation de
turbopompes et en permettant l'utilisation à la fois de propulseurs et de réservoirs
d'ergol de taille raisonnable qui limitent l'encombrement de l'étage de propulsion
considéré nécessaire au transfert d'orbite du satellite.
[0017] Ces buts sont atteints grâce à un module de propulsion cryotechnique à faible poussée,
présentant une poussée comprise entre 100 et 1000 N, caractérisé en ce qu'il comprend
au moins un propulseur cryotechnique principal dont la pression de combustion est
comprise entre 2 et 10 bars, au moins deux propulseurs secondaires de contrôle d'attitude,
au moins des premier et deuxième réservoirs d'alimentation en ergols cryogéniques,
des moyens de mise en pression intermittente desdits réservoirs d'alimentation et
des moyens pour déclencher des tirs du propulseur cryotechnique principal de façon
intermittente, pendant la mise en pression intermittente desdits réservoirs d'alimentation,
la durée entre deux tirs successifs étant comprise entre environ 1 heure 30 minutes
et 12 heures, en ce que les moyens de mise en pression intermittente d'un réservoir
d'alimentation comprennent au moins un circuit échangeur de chaleur associé à un accumulateur
thermique et des moyens de mise en circulation d'une quantité prédéterminée d'un ergol
dans ledit circuit échangeur de chaleur et en ce qu'il comprend en outre des moyens
pour réchauffer l'accumulateur thermique dans les périodes comprises entre deux tirs
consécutifs.
[0018] L'accumulateur thermique associé à un réservoir d'ergol peut être chauffé au moins
en partie à l'aide d'un capteur solaire, par exemple à l'aide d'un capteur solaire
plan dont le rapport absortivité/émissivité (α/ε) est supérieur à 1 et qui est muni
d'une super isolation sur sa face arrière.
[0019] L'accumulateur thermique peut toutefois également être chauffé au moins en partie
par récupération des pertes thermiques d'une pile à combustible fonctionnant à l'aide
des ergols évaporés.
[0020] La pile à combustible peut être alimentée par les vapeurs froides d'ergol issues
d'un échangeur de chaleur destiné à maintenir constante la température de puisage
d'un réservoir d'ergol.
[0021] L'accumulateur thermique peut aussi être chauffé au moins en partie par chauffage
électrique.
[0022] L'accumulation thermique au sein de l'accumulateur thermique est avantageusement
effectuée par un matériau à changement de phase tel qu'un métal alcalin sur un hydrocarbure.
[0023] Selon un mode particulier de réalisation, le module de propulsion cryotechnique comprend
des premier et deuxième réservoirs d'ergol pour alimenter le propulseur principal
et les ergols sont intégralement vaporisés dans les accumulateurs thermiques associés
aux réservoirs de manière à garantir un rapport de mélange constant.
[0024] Selon un mode de réalisation avantageux, le module de propulsion cryotechnique comprend
au moins des premier et deuxième réservoirs principaux d'ergols et au moins des premier
et deuxième réservoirs secondaires d'ergols constituant des réservoirs tampons, lesquels
réservoirs secondaires peuvent être mis en pression par lesdits moyens de mise en
pression et sont dimensionnés de manière à permettre d'assurer une manoeuvre orbitale
lorsqu'ils alimentent de façon intermittente le propulseur principal et à être totalement
vides à la fin d'un tir, des moyens étant prévus pour réalimenter lesdits réservoirs
secondaires à partir des réservoirs principaux correspondants, entre deux tirs successifs,
et la pression des réservoirs principaux étant maintenue inférieure à la pression
d'alimentation du propulseur principal.
[0025] Dans ce cas, selon un mode de réalisation particulier, un réservoir secondaire est
recouvert d'une isolation thermique et est monté à l'intérieur d'un réservoir principal.
Brève description des dessins
[0026] D'autres caractéristiques et avantages de l'invention ressortiront de la description
suivante de modes particuliers de réalisation de l'invention, donnés à titre d'exemples,
en référence aux dessins annexés, sur lesquels :
- la Figure 1 est une vue générale schématique d'un exemple de module de propulsion
cryotechnique selon l'invention et d'un satellite auquel le module est associé,
- la Figure 2 représente schématiquement un étage héliothermique selon l'art antérieur
et le satellite auquel est associé cet étage héliothermique,
- la Figure 3 est un schéma d'ensemble des organes fonctionnels principaux d'un exemple
de module de propulsion cryotechnique à chauffage solaire, selon un mode de réalisation
de l'invention,
- les Figures 4 et 5 sont respectivement des vues en coupe et de face d'un exemple de
capteur solaire plan à accumulateur thermique intégré et échangeur de chaleur, utilisable
dans le cadre de la présente invention,
- la Figure 6 est une vue schématique en coupe montrant l'association d'un capteur solaire
plan et d'un accumulateur thermique séparé,
- la Figure 7 montre en vue cavalière un exemple de capteur solaire passif associé à
des miroirs réflecteurs plans, utilisable dans le cadre de la présente invention,
- la Figure 8 montre en vue cavalière un exemple de capteur solaire passif associé à
des miroirs réflecteurs paraboliques,
- la Figure 9 montre le schéma d'ensemble des organes fonctionnels principaux d'un exemple
de module de propulsion cryotechnique selon l'invention mettant en oeuvre des réservoirs
tampons auxiliaires,
- la Figure 10 montre le schéma d'ensemble des organes fonctionnels principaux d'un
autre exemple de module de propulsion selon l'invention mettant en oeuvre des réservoirs
tampons auxiliaires et assurant une pré-vaporisation des ergols,
- la Figure 11 représente le schéma d'ensemble des organes fonctionnels principaux d'un
autre exemple de module de propulsion selon l'invention utilisant une pile à combustible,
- la Figure 12 montre l'implantation d'un échangeur de chaleur dans le fond d'un réservoir
principal d'ergol utilisable dans le module de propulsion cryotechnique selon l'invention,
- la Figure 13 montre le détail d'un exemple de réalisation de l'échangeur de chaleur
représenté sur la Figure 12, et
- la Figure 14 est une vue partielle d'un réservoir principal d'ergol utilisable dans
le module de propulsion cryotechnique selon l'invention et incorporant un réservoir
tampon à l'intérieur du réservoir principal.
Description détaillée de modes particuliers de réalisation de l'invention
[0027] On voit sur la Figure 1 le schéma d'ensemble d'un exemple de module de propulsion
cryotechnique 100 selon l'invention comprenant un propulseur principal 10 du type
à oxygène-hydrogène dont la pression de combustion, de l'ordre de 2 à 10 bars, est
suffisamment faible pour produire des flux thermiques à la paroi cinq à dix fois plus
faibles que dans le cas d'un propulseur cryotechnique classique, ce qui permet d'utiliser
pour ce propulseur principal 10 un refroidissement régénératif simplifié ou même un
refroidissement par rayonnement et par film.
[0028] Le propulseur principal 10 peut être unique et monté sur un cardan ou peut comprendre
un ensemble d'au moins trois propulseurs cryotechniques principaux dont la poussée
individuelle est contrôlée par une perte de charge variable sur les circuits d'alimentation
en ergols.
[0029] Le propulseur principal 10, ou l'ensemble des propulseurs principaux, sont à faible
poussée, de l'ordre de 100 à 1000 N, ce qui permet de diminuer leur encombrement et
donc de réduire l'encombrement de l'ensemble de l'étage propulsif. L'utilisation de
plusieurs propulseurs principaux à faible poussée permet par exemple de réduire la
longueur de l'ensemble de l'étage de plus de 3 mètres par rapport à des configurations
classiques.
[0030] Le module de propulsion 100 peut comprendre entre deux et six propulseurs de contrôle
d'attitude, tels que par exemple un propulseur 21 de contrôle en lacet et un propulseur
22 de contrôle en roulis.
[0031] L'alimentation électrique du module de propulsion 100 peut être effectuée à partir
d'un panneau solaire photovoltaïque 51 attaché au module, mais pourrait aussi être
effectuée à l'aide d'une prise ombilicale reliée au satellite 200 à mettre en orbite
avec le module de propulsion 100. L'alimentation électrique peut encore être réalisée
à l'aide d'une pile de combustible, telle que la pile à combustible 270 de la figure
11, qui peut être alimentée par l'évaporation des ergols cryogéniques.
[0032] L'alimentation en ergols du propulseur principal 10 est effectuée de façon intermittente
par mise en pression des réservoirs principaux 31, 32 de stockage respectivement d'hydrogène
liquide et d'oxygène liquide. La pression de fonctionnement étant faible, l'indice
de structure des réservoirs 31, 32 reste raisonnable.
[0033] Les réservoirs 31, 32 d'alimentation en ergols cryogéniques tels que H
2, O
2 sont mis en pression sans turbopompes, par simple évaporation d'une quantité prédéterminée
de chaque ergol dans un accumulateur thermique tel que par exemple l'accumulateur
60 des Figures 4 et 5 ou l'accumulateur 160 de la Figure 6. L'accumulateur thermique
60 est associé à un circuit échangeur de chaleur 70 et à une micro-pompe électrique
de mise en circulation d'une quantité déterminée d'ergol dans le circuit échangeur
de chaleur 70.
[0034] Sur la Figure 1 on a représenté à titre d'exemple une première micro-pompe 71 associée
au premier réservoir 31 et à un accumulateur thermique 61.
[0035] L'accumulateur thermique 60, 160 est réchauffé dans les périodes comprises entre
deux tirs consécutifs du propulseur principal 10.
[0036] L'accumulateur thermique peut être réchauffé soit par chauffage solaire, soit par
chauffage électrique, soit par récupération des pertes thermiques d'une pile à combustible
fonctionnant à l'aide des ergols évaporés, soit par une combinaison des trois méthodes.
[0037] L'accumulateur thermique est réchauffé entre deux tirs consécutifs du ou des propulseurs
10, cette durée de temps d'attente entre deux tirs étant comprise entre 1 heure 30
minutes et 12 heures suivant l'excentricité de l'orbite. Les tirs successifs du propulseur
principal 10 peuvent être par exemple en nombre compris entre 10 et 30 et sont effectués
au périgée ou à l'apogée de l'orbite, de sorte que la manoeuvre orbitale est ainsi
réalisée par incréments compte tenu de la poussée volontairement faible du module
de propulsion cryotechnique 100. Les intervalles de temps entre deux tirs successifs
ne constituent cependant pas des temps morts et sont mis à profit pour réchauffer
l'accumulateur thermique.
[0038] Les Figures 4 et 5 montrent un exemple d'accumulateur thermique 60 avec un capteur
solaire plan 60
a chauffant directement l'accumulateur thermique 60 en contact avec des tubes de circulation
d'hydrogène d'un circuit 70 d'échange de chaleur. Une couche de super-isolation 60
b est disposée à l'arrière de l'accumulateur thermique 60 et de l'échangeur de chaleur
70.
[0039] L'accumulateur thermique 60 proprement dit est avantageusement constitué d'un matériau
à changement de phase, tel qu'un métal alcalin ou un hydrocarbure, ce qui permet de
réduire la masse.
[0040] Le capteur solaire plan 60
a peut être muni d'un revêtement à émissivité contrôlée (rapport absortivité/émissivité
α/ε >> 1) de sorte que ce capteur peut atteindre une température d'équilibre supérieure
à 100°C au soleil. Le capteur des Figures 4 et 5 peut accepter des angles d'incidence
de flux solaire variant de plusieurs degrés.
[0041] A titre de variante, la Figure 6 montre un exemple de capteur solaire plan 160
a associé à une couche de super-isolation 160
b située sur la face arrière et servant à réchauffer un accumulateur thermique 160
séparé par l'intermédiaire d'un faisceau de tubes 160 plaqué sur la face avant du
capteur 160
a et d'un réseau 170
a de circulation de fluide associé à un microventilateur 170
b.
[0042] A la différence de la propulsion héliothermique, l'utilisation de capteurs solaires
plans 60
a permet d'éliminer les exigences de pointage précis, une erreur de l'ordre de ± 20°
sur deux axes étant parfaitement acceptable.
[0043] La surface, et donc la masse du capteur solaire 60
a, peut être déterminée en utilisant des miroirs de concentration plans 161 (Figure
7) ou paraboliques-cylindriques 162 (Figure 8) sans que cela augmente les exigences
de pointage sur le soleil.
[0044] La Figure 3 montre le schéma de principe de la mise en pression des réservoirs 31,
32 par accumulation thermique avec des accumulateurs thermiques 61, 62, munis de capteurs
solaires, associés respectivement aux réservoirs principaux 31, 32 d'hydrogène liquide
et d'oxygène liquide.
[0045] Sur l'exemple de la Figure 3, un circuit électronique de commande 110, alimenté par
un panneau solaire 51, assure l'alimentation de micro-pompes électriques 71, 72 associées
aux réservoirs 31, 32. Le panneau solaire 51 peut être monté sur le module de propulsion
ou sur le satellite à mettre en orbite, la connexion électrique entre le panneau solaire
51 et le circuit électrique de commande pouvant être assurée par un connecteur largable.
Le module de propulsion 100 peut toutefois être lui-même intégré au satellite 200.
[0046] Les micro-pompes électriques 71, 72 injectent à la demande les ergols liquides dans
les accumulateurs thermiques 61, 62, ce qui amène les ergols au voisinage de la température
ambiante et assure par les lignes 105, 106 la mise en pression des réservoirs correspondants
31, 32.
[0047] Lorsque les pressions de consigne sont atteintes, les micro-pompes 71, 72 sont arrêtées.
Le contrôle des micro-pompes 71, 72 est assuré par les circuits électroniques de commande
110 reliés à des capteurs de pression 101, 102 mesurant la pression des réservoirs
31, 32.
[0048] Après mise en pression des réservoirs 31, 32, il suffit d'ouvrir les électrovannes
91, 92 d'alimentation du moteur principal 10 en ergols, puis d'allumer le moteur 10
par décharge électrique afin d'assurer la manoeuvre orbitale.
[0049] La configuration représentée sur la Figure 3 peut être améliorée en utilisant des
réservoirs tampons auxiliaires 33, 34 en association avec des réservoirs principaux
d'ergols 31, 32, comme représenté sur les Figures 9 à 11, sur lesquelles on n'a toutefois
pas représenté le circuit électronique de commande 110, les capteurs de pression 101,
102 et l'alimentation électrique 51 afin de clarifier les dessins, bien que ces éléments
fassent également partie des modes de réalisation des Figures 9 à 11.
[0050] Dans la mesure où la masse d'ergols utilisée au cours d'une manoeuvre est de l'ordre
de 100 kg, on peut utiliser pour les manoeuvres des réservoirs tampons 33, 34 de petite
taille plus faciles à mettre en pression que les réservoirs principaux 31, 32. Ceci
permet par ailleurs de diminuer l'indice de structure des réservoirs principaux 31,
32, ces derniers étant soumis à une pression modérée de l'ordre de 1 bar absolu.
[0051] Si l'on considère la Figure 9, on voit que les réservoirs auxiliaires 33, 34 initialement
à basse pression, après un tir, peuvent être remplis en ergol à partir des réservoirs
principaux 31, 32 en ouvrant les vannes 93, 94 de communication entre les réservoirs
principaux 31, 32 et les réservoirs auxiliaires 33, 34.
[0052] Les réservoirs auxiliaires 33, 34 sont ensuite mis en pression par activation des
micro-pompes 71, 72 injectant l'ergol liquide dans les accumulateurs thermiques 61,
62, les vannes 103, 104 situées sur les canalisations 105, 106 de mise en pression
des réservoirs principaux 31, 32 restant fermées.
[0053] La pression dans les réservoirs auxiliaires 33, 34 peut ainsi passer de 1 bar à par
exemple 5 bars. Lorsque la pression de consigne est atteinte, les vannes 91, 92 d'alimentation
du propulseur principal 10 sont ouvertes et la manoeuvre peut avoir lieu.
[0054] Pendant le tir du propulseur 10, la pression des réservoirs tampons 33, 34 est maintenue
à peu près constante par activation à la demande des micro-pompes.
[0055] Le flux de gaz circulant dans les accumulateurs thermiques 61, 62 permet également
le fonctionnement des propulseurs de contrôle d'attitude 21, 22 par l'intermédiaire
des lignes 121, 122 alimentées en ergols gazeux à travers les vannes 107, 108 interposées
entre les accumulateurs thermiques 61, 62 et les réservoirs tampons 33, 34.
[0056] On notera que dans le cas des modes de réalisation des Figures 7 et 9, le propulseur
principal 10 est alimenté en ergols liquides.
[0057] On peut souhaiter alimenter ce propulseur 10 en ergols vaporisés afin d'éviter des
difficultés de mise en froid ou de grandes variations du rapport de mélange qui pourraient
apparaître compte tenu de la petite taille du propulseur principal 10.
[0058] La Figure 10 montre un exemple de réalisation selon l'invention dans lequel non seulement
les propulseurs auxiliaires 21, 22, 23 sont alimentés en gaz, mais le propulseur principal
10 est lui-même alimenté en ergols gazeux vaporisés dans les accumulateurs thermiques
61, 62.
[0059] Dans le cas de la Figure 10, où les éléments semblables à ceux de la Figure 9 portent
les mêmes numéros de référence, l'ensemble des ergols envoyés par les micro-pompes
71, 72 dans les accumulateurs thermiques 61, 62 est vaporisé. La capacité thermique
des accumulateurs doit être adaptée en conséquence. Les ergols vaporisés ne sont pas
renvoyés vers les réservoirs tampons 33, 34 après passage dans les accumulateurs thermiques
61, 62, mais sont au contraire injectés directement dans le propulseur principal 10
et dans les propulseurs secondaires 21 à 23.
[0060] A titre d'exemple, pour vaporiser, puis chauffer, 20 kg d'hydrogène liquide, il faut
une énergie de 37 MJ, ce qui suppose une puissance moyenne de 2500 W en 3 heures.
Un capteur solaire de 2,2 m
2 est largement suffisant pour fournir une telle puissance.
[0061] On notera que, pour que les réservoirs tampons puissent être remplis en microgravité,
il faut être sûr que l'ergol liquide soit toujours présent du côté du puisage du réservoir
principal.
[0062] Pour résoudre ce problème, on fait circuler lentement l'ergol liquide sur les parois
du réservoir et on refroidit localement le puisage à l'aide d'un échangeur de chaleur.
[0063] Un exemple d'un tel dispositif dénommé ATVS (Active Thermodynamic Vent System) est
décrit dans la publication de E.C. Cady et A.D. Olsen intitulée "Thermal Upper Stage
Technology Demonstration Program" AIAA 96 ― 3011 ― 32nd AIAA Joint Propulsion Conference,
Lake Buena Vista, juillet 1996.
[0064] Les Figures 12 et 13 montrent un exemple de mise en oeuvre d'un tel dispositif dans
un réservoir principal 31 d'un module de propulsion selon l'invention.
[0065] Le fond du réservoir 31 est occupé par un volume de puisage refroidi par un échangeur
de chaleur 370 pouvant comprendre un tube d'échangeur 375 à ailettes. Une petite pompe
électrique 371 permet de faire circuler le fluide refroidi dans le réservoir par l'intermédiaire
d'un tube central 380. Une vanne de détente 390 permet de vaporiser le fluide et les
vapeurs froides sont ensuite évacuées en dehors du réservoir par un tube 391. Le puisage
des vapeurs froides peut n'avoir lieu que pendant le tir du propulseur principal,
qui a été alimenté par la canalisation inférieure 374.
[0066] La Figure 11 montre un exemple de réalisation mettant en oeuvre une pile à combustible
270 pouvant être alimentée en permanence en ergols à partir des réservoirs principaux
31, 32 et auxiliaires 33, 34. En particulier, la pile à combustible 270 peut être
alimentée par les vapeurs froides d'ergol issues de l'échangeur de chaleur destiné
à maintenir constante la température de puisage de chaque réservoir principal.
[0067] La pile à combustible 270 peut fournir, par l'intermédiaire d'une barre de puissance
280, la puissance nécessaire aux différentes servitudes (pompes, vannes, réchauffeurs
électriques) ainsi qu'à la case à équipements du module de propulsion (centrale inertielle,
calculateur de bord, liaisons radio).
[0068] Le rendement de la pile 270 étant de l'ordre de 50%, les pertes sont utilisées pour
réchauffer tout ou partie des ergols alimentant le propulseur principal 10, dans un
module 260 constituant un échangeur de chaleur et un accumulateur thermique. La puissance
dissipée par la pile 270 est ainsi stockée dans l'accumulateur 260 afin de réchauffer
les ergols liquides, ce qui permet de mettre en pression les réservoirs auxiliaires
33, 34 et d'alimenter aussi bien le propulseur principal 10 que les propulseurs de
contrôle d'attitude 21 à 23.
[0069] Si la pile développe une puissance moyenne de 1 kW, l'énergie accumulée en trois
heures atteindra sensiblement 11 MJ.
[0070] Dans le cas d'un mode de réalisation tel que celui de la Figure 11 utilisant une
pile à combustible 270 plutôt qu'un capteur solaire 60
a comme source de chauffage, le contrôle d'attitude par les propulseurs secondaires
21 à 23 peut être découplé du pointage vers le soleil, ce qui offre une liberté supplémentaire
dans le positionnement.
[0071] La Figure 14 représente une variante de réalisation dans laquelle un réservoir tampon
133 est disposé à l'intérieur d'un réservoir principal 131. Ceci permet de réaliser
un ensemble plus compact et de diminuer les pertes thermiques.
[0072] Le réservoir tampon 133 est muni d'une couche extérieure 139 d'isolation thermique
et est associé à une vanne de remplissage 193 et à une ligne 138 de mise en pression
du réservoir.
[0073] Le réservoir tampon 133 est monté au-dessus d'un échangeur de chaleur 370 qui peut
être similaire à l'échangeur de chaleur de la Figure 13. La présence d'un réservoir
tampon 133 incorporé dans un réservoir principal 131 favorise la rétention du liquide
à proximité de l'échangeur de chaleur 370, en particulier en fin de fonctionnement.
Le tube de circulation 380 est déporté sur le côté du réservoir principal 131.
[0074] Dans un module de propulsion selon l'invention, le contrôle du vecteur poussée peut
s'effectuer de trois manières différentes, la fonction anti-roulis étant elle-même
assurée par au moins deux propulseurs auxiliaires 21, 22.
[0075] Selon un premier cas, le propulseur principal 10 est associé à deux paires de propulseurs
auxiliaires de contrôle en tangage et lacet, d'axe parallèle au propulseur principal
10 qui est fixe.
[0076] Selon un deuxième cas, le propulseur principal 10 est monté sur une articulation
de cardan. Deux vérins électromécaniques assurent une orientation vis-à-vis du module
de propulsion.
[0077] Selon un troisième cas, la fonction du propulseur principal est assurée par trois
ou quatre propulseurs dont la poussée peut être réglée par une vanne proportionnelle
laminant plus ou moins le débit d'ergol, ce qui permet de contrôler la position du
vecteur poussée vis-à-vis du centre de gravité.
[0078] Dans le cas où le module de propulsion cryotechnique 100 selon l'invention utilise
des capteurs solaires, on peut noter que les exigences de pointage sont très faciles
à satisfaire (de l'ordre de 20° de tolérance selon deux axes) tandis que la mise en
oeuvre de solutions du type héliothermique implique un pointage de deux axes à 5'
d'arc près.
[0079] Par ailleurs, le propulseur cryotechnique à faible poussée présente un volume plus
faible du fait de la densité moyenne des ergols de 0,3 au lieu de 0,07 par rapport
aux solutions héliothermiques, ce qui rend plus facile l'intégration sous une coiffe.
De plus, la masse sèche du module selon l'invention est réduite car le stockage thermique
est moins lourd, le pourcentage de masse des réservoirs est inférieur à 10% (contre
environ le double dans le cas d'une solution héliothermique) et un concentrateur primaire
de l'énergie solaire n'est plus nécessaire comme dans le cas des solutions héliothermiques.
Enfin, la durée totale d'une mission est également raccourcie avec un module de propulsion
selon l'invention.
[0080] Si l'on effectue une comparaison avec un étage supérieur cryotechnique conventionnel,
un module de propulsion selon l'invention présente à technologie égale une masse sèche
plus faible du fait qu'il n'est pas fait usage de sphères d'hélium ni de platines
de détente de gaz et du fait que le propulseur principal est lui-même moins lourd
et beaucoup moins encombré. De plus, le propulseur principal est moins coûteux et
la plupart des autres composants, de petite taille, sont également d'un coût réduit.
[0081] Dans le cas d'un étage supérieur cryotechnique alimenté par la pression d'un réservoir
de façon classique, on peut noter que la faible pression du foyer combinée à une poussée
élevée conduit à un propulseur très encombrant et qui néanmoins présente un rapport
de section plus faible qu'un moteur à turbopompes, c'est-à-dire une impulsion spécifique
plus faible.
[0082] Au contraire, la solution proposée dans le cadre de la présente invention permet
de concilier une faible pression du foyer et un faible encombrement grâce à la réalisation
de tirs multiples aux apsides.
[0083] La faible pression du foyer diminue le flux thermique qui est environ huit fois plus
faible que sur un moteur à turbopompes, ce qui permet d'appliquer un refroidissement
régénératif simplifié ou encore un refroidissement par rayonnement.
[0084] Par ailleurs, l'utilisation du chauffage solaire, au moins pour la pressurisation
des réservoirs, permet de supprimer la masse et les servitudes liées à la pressurisation
à l'hélium.
[0085] Enfin, l'invention permet facilement de coordonner les séquences de tirs intermittents
avec les phases de réchauffage des accumulateurs thermiques
1. Module de propulsion cryotechnique à faible poussée, présentant une poussée comprise
entre 100 et 1000 N, caractérisé en ce qu'il comprend au moins un propulseur cryotechnique principal (10) dont la pression de
combustion est comprise entre 2 et 10 bars, au moins deux propulseurs secondaires
(21, 22) de contrôle d'attitude, au moins des premier et deuxième réservoirs (31,
32, 33, 34) d'alimentation en ergols cryogéniques, des moyens (110, 71, 72, 61, 62)
de mise en pression intermittente desdits réservoirs d'alimentation (31, 32, 33, 34)
et des moyens (110, 91, 92) pour déclencher des tirs du propulseur cryotechnique principal
(10) de façon intermittente, pendant la mise en pression intermittente desdits réservoirs
d'alimentation (31, 32, 33, 34), la durée entre deux tirs successifs étant comprise
entre environ 1 heure 30 minutes et 12 heures, en ce que les moyens de mise en pression intermittente d'un réservoir d'alimentation (31, 32,
33, 34) comprennent au moins un circuit échangeur de chaleur (70 ; 170a) associé à
un accumulateur thermique (60 ; 160 ; 260) et des moyens (71, 72) de mise en circulation
d'une quantité prédéterminée d'un ergol dans ledit circuit échangeur de chaleur (70
; 170a) et en ce qu'il comprend en outre des moyens(161, 162, 270) pour réchauffer l'accumulateur thermique
(60 ; 160 ; 260) dans les périodes comprises entre deux tirs consécutifs.
2. Module de propulsion selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'accumulateur thermique (60 ; 160) est chauffé au moins en partie à l'aide d'un
capteur solaire (60a ; 160a).
3. Module de propulsion selon la revendication 2, caractérisé en ce que l'accumulateur thermique (60 ; 160) est réchauffé par un capteur solaire plan (60a
; 160a) dont le rapport absortivité/émissivité (α/ε) est supérieur à 1 et qui est
muni d'une super isolation (60b ; 160b) sur sa face arrière.
4. Module de propulsion selon la revendication 2 ou la revendication 3, caractérisé en ce que le capteur solaire (60a ; 160a) est associé à un système de miroirs de concentration
(161; 162) plans, ou paraboliques-cylindriques.
5. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que l'accumulateur thermique (260) est chauffé au moins en partie par récupération des
pertes thermiques d'une pile à combustible (270) fonctionnant à l'aide des ergols
évaporés.
6. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que l'accumulation thermique au sein de l'accumulateur thermique (60 ; 160 ; 260) est
effectuée par un matériau à changement de phase tel qu'un métal alcalin sur un hydrocarbure.
7. Module de propulsion selon la revendication 5, caractérisé en ce que la pile à combustible (270) est alimentée par les vapeurs froides d'ergol issues
d'un échangeur de chaleur (370) destiné à maintenir constante la température de puisage
d'un réservoir d'ergol (31).
8. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que l'accumulateur thermique (60 ; 160 ; 260) est chauffé au moins en partie par chauffage
électrique.
9. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il comprend un propulseur cryotechnique principal unique (10) monté sur un cardan.
10. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il comprend au moins trois propulseurs cryotechniques principaux dont la poussée individuelle
est contrôlée par une perte de charge variable sur les circuits d'alimentation en
ergols.
11. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il comprend des premier et deuxième réservoirs d'ergol (31, 32) pour alimenter le
propulseur principal (10) et en ce que les ergols sont intégralement vaporisés dans les accumulateurs thermiques (61, 62)
associés aux réservoirs (31, 32) de manière à garantir un rapport de mélange constant.
12. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 11, caractérisé en ce qu'un réservoir d'alimentation (31, 32) est muni d'une pompe de circulation (371) montée
sur le corps d'un échangeur de chaleur associé (370) situé du côté puisage.
13. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 12, caractérisé en ce qu'il comprend au moins des premier et deuxième réservoirs d'ergols principaux (31, 32)
et au moins des premier et deuxième réservoirs d'ergols secondaires (33, 34) constituant
des réservoirs tampons, lesquels réservoirs secondaires (33, 34) peuvent être mis
en pression par lesdits moyens de mise en pression et sont dimensionnés de manière
à permettre d'assurer une manoeuvre orbitale lorsqu'ils alimentent de façon intermittente
le propulseur principal (10) et à être totalement vides à la fin d'un tir, des moyens
étant prévus pour réalimenter lesdits réservoirs secondaires (33, 34) à partir des
réservoirs principaux correspondants (31, 32), entre deux tirs successifs, et la pression
des réservoirs principaux (31, 32) étant maintenue inférieure à la pression d'alimentation
du propulseur principal (10).
14. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 13, caractérisé en ce qu'au moins un réservoir secondaire (133) est recouvert d'une isolation thermique et
est monté à l'intérieur d'un réservoir principal (131).
15. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 14, caractérisé en ce qu'il comprend une alimentation électrique constituée par une pile à combustible (270)
alimentée par l'évaporation des ergols cryogéniques.
16. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 14, caractérisé en ce qu'il comprend une alimentation électrique constituée par au moins un panneau solaire
(51) attaché à ce module.
17. Module de propulsion selon l'une quelconque des revendications 1 à 14, caractérisé en ce qu'il comprend une alimentation électrique constituée par une prise ombilicale reliée
au satellite (200) mis en orbite avec ce module (100).