[0001] La présente invention est relative à un dispositif de protection d'un spiral de pièce
d'horlogerie contre des champs magnétiques perturbateurs provenant de l'extérieur
de cette pièce d'horlogerie.
[0002] Dans les pièces d'horlogerie mécaniques, le matériau constituant le spiral est généralement
réalisé dans un alliage métallique tel qu'un acier susceptible d'aimantation rémanente
s'il est soumis à un champ magnétique extérieur. Bien qu'il soit possible d'envisager
réaliser cette pièce dans un matériau non magnétique afin de neutraliser l'impact
d'un champ magnétique extérieur perturbant le bon fonctionnement d'une telle pièce
d'horlogerie mécanique, cet inconvénient de susceptibilité à l'aimantation pour un
spiral réalisé avec des matériaux traditionnels est très largement compensé par les
excellentes qualités mécaniques qui lui sont conférées (ductilité, élasticité, coefficient
de dilatation thermique etc.) Il a par conséquent été cherché à protéger ce type de
spiraux contre ces champs perturbateurs, de telle sorte que si on soumet le mouvement
à un champ de l'ordre de 4,8kA/m, l'écart de marche ne dépasse pas 30 secondes par
jour selon une normalisation horlogère. Au-delà de ce champ de 4,8kA/m et sans protection
cet écart est très variable et atteint des variations importantes, jusqu'à plusieurs
minutes par jour. Cet écart est dû surtout à l'aimantation longitudinale des spires
dont est fait le spiral, cette aimantation produisant sur l'axe du balancier auquel
est lié le spiral un couple qui s'additionne ou se soustrait au couple mécanique de
fonctionnement normal. L'écart de marche est aussi influencé, mais dans une moindre
mesure, par le phénomène de magnétostriction tendant à allonger ou à raccourcir le
ruban dont est fait le spiral lorsqu'il est soumis à un champ magnétique.
[0003] Pour résoudre ce problème d'isolation magnétique, on a déjà proposé des dispositifs
qui assurent la protection d'une pièce d'horlogerie contre l'influence perturbatrice
de champs magnétiques extérieurs de toute nature, comme par exemple des champs externes
provenant d'aimants permanents ou de moteurs électriques de tout genre.
[0004] La solution la plus simple et la plus radicale aussi consiste à blinder entièrement
le mouvement de la pièce d'horlogerie pour n'y laisser pénétrer aucune ligne de champs
perturbatrice. C'est le cas proposé par le document
CH 122391 où le mouvement de la montre est protégé par un ensemble d'éléments formés d'un alliage
inoxydable, à haute perméabilité et à faible hystérésis, formant un écran magnétique.
Les éléments sont une cuvette disposée entre le mouvement et le fond de la montre,
un cercle cache-poussière formant une calotte disposée entre le mouvement et un cercle
d'encageage, et une plaque intermédiaire disposée entre la platine de la montre et
son cadran. Cette façon de faire est extrêmement lourde et coûteuse. En effet elle
demande trois pièces supplémentaires qui non seulement alourdissent la montre mais
augmentent également son volume.
[0005] Une solution plus légère et moins encombrante que celle proposée ci-dessus est décrite
dans le document
FR 1.408.872. Il ne s'agit plus ici d'entourer complètement le mouvement de la montre par un matériau
à haute perméabilité mais seulement son fond et son pourtour. A cet effet, le dispositif
est constitué par un élément de boîtier présentant une perméance suffisante aux champs
magnétiques, l'élément de boîtier étant complété par un cercle d'emboîtage en acier
doux avec lequel il forme une cuvette enveloppant le mouvement et formant un écran
magnétique. L'élément de boîtier est formé par le fond du boîtier, ce fond étant réalisé
en alliage inoxydable et polissable présentant une structure ferritique homogène.
Ainsi, dans cette réalisation, il n'y a aucun ajout de pièces supplémentaires, le
fond et le cercle d'emboîtage étant directement faits en matériaux à haute perméabilité
magnétique. De plus aucun écran n'est disposé entre le mouvement et le cadran de la
montre, le dispositif de protection se limitant à une cuvette sans couvercle servant
de logement au mouvement de la montre.
[0006] Un premier inconvénient de cette dernière solution cependant est que le spiral proprement
dit n'est pas protégé contre un champ perturbateur quelle que soit l'orientation de
ce champ régnant dans le plan du spiral. En effet, comme le spiral est décentré par
rapport au centre du mouvement et si l'on désire une protection omnidirectionnelle,
il s'agit de proposer un dispositif centré par rapport audit spiral et non par rapport
au mouvement dans son ensemble comme c'est le cas du document cité plus haut. Un autre
inconvénient de cette solution est de masquer totalement le mouvement, ce qui est
préjudiciable d'un point de vue esthétique, notamment pour les montres haut de gamme.
[0007] La présente invention a par conséquent pour but de fournir une solution de blindage
magnétique d'un spiral exempte des limitations ci-dessus.
[0008] Ces buts sont atteints selon l'invention par la revendication principale qui, en
plus qu'elle obéit à ce qui est exposé au premier paragraphe ci-dessus, est originale
en ce que le dispositif de protection comporte un balancier constitué en un matériau
ferromagnétique.
[0009] Un avantage de la solution est de réaliser un blindage magnétique, en utilisant avantageusement
certains éléments du mouvement comme élément de blindage, et de ne nécessiter ainsi
de préférence l'usage d'aucune pièce supplémentaire. L'encombrement est ainsi réduit
au maximum.
[0010] Un avantage additionnel de la solution et de réaliser un blindage magnétique centré
sur l'axe de rotation du spiral afin d'en améliorer l'efficacité.
[0011] Un autre avantage de la solution proposée est de permettre la visualisation des éléments
du mouvement par le fond de la montre, améliorant ainsi l'esthétique globale de la
pièce d'horlogerie réalisée.
[0012] L'invention va être expliquée maintenant en détail ci-dessous par plusieurs modes
d'exécution donnés à titre d'exemples non limitatifs, ces exécutions étant illustrées
par les dessins annexés dans lesquels:
- les figures 1A et 1B montrent un spiral en perspective dans le plan ainsi qu'une portion
de ce spiral;
- la figure 2 est une vue schématique et en perspective d'un mode de réalisation préférentiel
de l'invention.
- la figure 3 est une vue schématique et en perspective d'un mode de réalisation alternatif
de l'invention.
[0013] Dans le contexte actuel où la densité de parasites électromagnétiques augmente très
fortement, notamment en raison des réseaux sans fils cellulaires (3G) nomades (Wi-Fi)
de nouvelle génération, mais aussi de l'augmentation du nombre de petits aimants permanents
utilisés pour la fermeture de sacs à main ou d'étuis pour téléphone mobile par exemple,
il est important de trouver des solutions de blindage magnétique permettant de garantir
aujourd'hui l'isochronisme des systèmes réglants de montres mécaniques.
[0014] Ce faisant, l'horloger est toutefois confronté à un problème de place pour loger
le blindage sur la platine et dans le boîtier. Par conséquent, il a été cherché à
trouver des solutions optimales qui combinent un encombrement minimal et une atténuation
efficace du champ magnétique.
[0015] Plutôt que d'essayer de diminuer ou de supprimer totalement le champ magnétique perturbateur
au niveau du spiral par l'intermédiaire de solutions lourdes et encombrantes, il apparaît
plus judicieux d'orienter ou de dévier ce champ perturbateur, sans nécessairement
le diminuer ou le supprimer, dans des directions où il est le moins néfaste du point
de vue de son potentiel à polariser le matériau magnétique dont est constitué le spiral.
[0016] L'organe réglant d'une montre mécanique est constitué en général d'un ressort spiral,
comme illustré sur la figure 1A. Le spiral est monté autour d'un axe de rotation Z
et est enroulé dans un plan perpendiculaire à cet axe. Le diamètre du spiral dans
ce plan est noté
d, tandis que la hauteur du spiral selon l'axe Z est notée
h. La figure 1B montre une portion de ce spiral 1 qui est un ruban très long enroulé
sur lui-même, ce ruban présentant de préférence une hauteur
h réduite et une très faible épaisseur
e. Il résulte de cela que si on le polarise dans le sens de la hauteur Z ou orthogonalement,
ou encore dans le sens de l'épaisseur R ou radialement, peu ou pas d'aimantation rémanente
ne subsistera. Par contre une polarisation dans le sens de la longueur L est à éviter
car elle est la seule, surtout sur les spires extérieures du spiral, à provoquer une
aimantation résiduelle de ce dernier produisant, comme on l'a vu plus haut, un couple
supplémentaire parasite provoquant une variation aléatoire du couple de rappel du
spiral affectant l'isochronisme du système réglant. Pour éviter ou diminuer fortement
cette polarisation longitudinale, il est par conséquent suffisant d'orienter les lignes
de champ dans une configuration plus ou moins orthogonale et radiale au plan du spiral
1.
[0017] Afin de minimiser l'encombrement, on cherche dans le cadre de l'invention à utiliser
avantageusement des éléments du mouvement afin de ne pas nécessiter d'espace supplémentaire
pour le blindage magnétique pour un calibre donné. Le balancier 2, dont un mode de
réalisation préférentiel à quatre branches est représenté en figure 2, apparaît dès
lors comme l'élément le plus adéquat, en raison de l'emplacement de ses bras 3 dans
un plan parallèle au plan du spiral 1, et leur configuration symétrique par rapport
à l'axe de rotation Z du spiral 1. Cette disposition symétrique des bras 3 par rapport
à l'axe de rotation Z ainsi que le blindage conféré par le cercle d'encageage 4, coaxial
au spiral et d'une hauteur
H choisie de préférence largement supérieure, par exemple au moins 3 fois supérieure
à la celle de la hauteur du spiral
h, permettent non seulement de fortement atténuer l'amplitude du champ magnétique appliqué
à l'intérieur de l'espace dans lequel repose le spiral 1, jusqu'à saturation du champ
induit dans le cercle d'encageage 4, mais également de conférer une protection omnidirectionnelle
par rapport au champ magnétique perturbateur, quelle que soit l'orientation de ce
champ.
[0018] Le cercle d'encageage 4 permet du reste de protéger efficacement le spiral 1 contre
les champs magnétiques perturbateurs, car ces derniers sont déviés en plus grand nombre
dans le sens vertical de l'axe Z de rotation, qui est une direction de polarisation
selon laquelle le spiral est moins sensible. On notera cependant que la concentration
du champ en périphérie des bras 3 et au niveau du cercle 4 a toujours tendance à accroître
localement ce champ, d'où la nécessité de prévoir un cercle d'encageage 4 de diamètre
D relativement grand par rapport au diamètre
d du spiral 1, de préférence au moins deux fois afin qu'aucune partie du spiral, même
au niveau le plus extérieur, ne puisse subir cet effet indésirable de concentration.
Afin d'améliorer le niveau de saturation du champ induit dans le cercle d'encageage
4, il est possible d'augmenter la section de ce dernier; toutefois un compromis doit
être également trouvé par rapport au moment d'inertie conféré au balancier, qui doit
être maintenu à un niveau relativement faible pour réduire les efforts exercés par
le spiral 1. Afin d'augmenter la hauteur du cercle d'encageage 4 sans en augmenter
la masse, on pourra choisir une section la plus effilée possible, avec par exemple
un rapport entre la hauteur et la largeur de cette section supérieure à 10. Ainsi
la polarisation des lignes de champ sera plus efficace selon la direction verticale
Z.
[0019] La démarche de produire des pièces du mouvement en matériau ferromagnétique, c'est-à-dire
ayant une susceptibilité magnétique (généralement notée par la lettre grecque χ) très
élevée, n'avait jusqu'à présent jamais été considérée par l'homme du métier de l'horlogerie
en raison de la forte tendance à l'oxydation des matériaux ferromagnétiques usuels,
notamment par la présence de fer et l'insuffisance de chrome dans ces alliages. Il
est toutefois désormais possible de traiter en surface ce type de matériaux par des
agents anticorrosion afin d'éviter ce désagrément, tout en ne modifiant pas les propriétés
magnétiques. Le matériau à haute saturation magnétique utilisé pour confectionner
le cercle d'encageage 4 et les bras 3 peut consister par exemple en alliage fer-nickel,
fer-cobalt, fer-chrome, ou encore des alliages de type fer-nickel-molybdène, fer-nickel-cuivre.
Certains alliages métalliques amorphes, à base de fer, sont également envisageables;
ce type d'alliage étant reconnu pour ses propriétés de faible coercivité et forte
perméabilité magnétique, c'est-à-dire avec des cycles d'hystérèse très étroits, et
avec une pente très élevée, sont par ailleurs très résistants à la corrosion et ainsi
particulièrement adaptés pour la mise en oeuvre de l'invention. La nature chimique
de l'alliage est choisie de façon à ce que le comportement magnétique du matériau
ait une perméabilité magnétique et un niveau de saturation élevés ; selon le mode
de réalisation préférentiel de l'invention, il a par exemple été fait usage d'un alliage
Pernenorm fer-nickel avec une teneur en nickel de 45 à 50%.
[0020] Selon le mode de réalisation préférentiel illustré sur la figure 2, le balancier
2 comporte au moins quatre bras aplatis qui s'étendent dans le plan d'enroulement
du spiral. Lors de l'utilisation de la montre, le balancier est activé en rotation
en permanence et une surface essentiellement plane est émulée pour constituer un bouclier
magnétique dans ce plan. Selon cette variante illustrée, où l'atténuation est de l'ordre
de moitié entre un champ externe et le champ là où se situe le spiral 1, dont le diamètre
d et la hauteur
h respectent de préférence les ratios énoncés précédemment par rapport à ceux
D,H du cercle d'encageage 4.
[0021] Afin d'améliorer encore l'efficacité du blindage, il est possible d'augmenter le
nombre de bras et/ou leur épaisseur afin d'augmenter la surface de protection. Lorsque
la pluralité de bras 3 couvre une surface égale à plus d'un quart du disque virtuel
délimité par le cercle d'encageage 4 dans le plan de rotation de bras 3, on a mesuré
une atténuation des perturbations relatives aux écarts de marche pouvant atteindre
des ratios supérieurs à 3, notamment pour des valeurs d'induction supérieures à 10
millitesla (mT), soit environ 8kA/m pour un balancier à trois bras avec le rapport
de surface suscité par rapport au disque virtuel délimité par le cercle d'encageage.
Il est possible d'améliorer encore ces ratios jusqu'à des valeurs de 6-7 avec un disque
plein en lieu et place des bras 3; cette solution présente toutefois l'inconvénient
d'augmenter la masse du système et par conséquent, le moment d'inertie et l'énergie
consommée. On privilégiera donc, afin de ne pas augmenter la masse totale du système,
des bras aplatis au maximum pour une masse donnée, c'est-à-dire dont les dimensions
s'étendent le plus possible dans leur plan de rotation, de telle sorte que la polarisation
du champ soit optimale dans la direction verticale Z. Quel que soit le nombre de bras
utilisés dans le cadre de l'invention, on pourra considérer que les bras sont qualifiés
d'aplatis lorsque le rapport entre la largeur et la longueur de leur section est supérieur
à environ 10, de telle sorte qu'ils couvrent la surface la plus grand possible dans
le plan du disque virtuel délimité par le cercle d'encageage 4.
[0022] Afin d'améliorer encore l'efficacité du blindage magnétique, le dispositif selon
l'invention pourra comporter une deuxième série de bras 3 surmontés sur ledit cercle
d'encageage 4, comme illustré sur la figure 3. La série de bras 3' pourra être de
préférence décalée angulairement, ou de forme géométrique différente ou complémentaire
mais symétrique. On pourra également imaginer que les deux séries de bras soient identiques
à celle des bras 3 inférieurs, de telle sorte que les deux séries de bras 3 et 3'
soient superposées. L'avantage de recouvrir le blindage magnétique sur le dessus par
des bras tournants permet d'une part de constituer un espace symétrique et totalement
fermé à l'intérieur duquel est disposé le spiral 1, ce qui rend le blindage efficace
à la fois en termes d'atténuation et d'isotropie; d'autre part, similairement aux
valeurs d'atténuation mesurées avec les seuls bras 3 l'efficacité massique du blindage
est fortement améliorée par rapport à une surface pleine comme un disque. La pièce
formant le balancier avec deux séries de bras 3,3' pourra être formée de façon monobloc
par exemple par un processus de type LIGA, ou par emboîtage mutuel d'une nervure dans
une rainure de pièces de type mâle-femelle comportant chacune une série de bras et
formant chacune une partie du cercle d'encageage 4.
[0023] L'homme du métier pourra par ailleurs constater qu'un avantage de tous les modes
de réalisation proposés est de ne pas entraver la visualisation du mouvement, notamment
par le fond du boîtier, comme c'est le cas les blindages usuels. Cette possibilité
pourra par conséquent être utilisée pour la confection de montres squelette ou tourbillon
où au moins une partie du mouvement est destiné à être visible par l'utilisateur.
1. Dispositif de protection d'un spiral (1) de pièce d'horlogerie contre des champs magnétiques
perturbateurs provenant de l'extérieur de ladite pièce, caractérisé en ce qu'il comporte un balancier (2) réalisé en matériau ferromagnétique.
2. Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que le balancier (2) est traité en surface par un agent anticorrosion.
3. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 2, caractérisé en ce que le balancier (2) est réalisé en un alliage métallique amorphe.
4. Dispositif selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que ledit balancier (2) comporte au moins quatre bras (3) aplatis.
5. Dispositif selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que le balancier (2) est composé d'une pluralité de bras (3) couvrant une surface égale
à plus d'un quart du disque délimité par le cercle d'encageage (4).
6. Dispositif selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que le balancier (2) comprend une deuxième série de bras (3') surmontés sur ledit cercle
d'encageage (4).
7. Dispositif selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que ledit balancier (2) a un diamètre (D) au moins deux fois supérieur au diamètre (d)
dudit spiral (1).